Mercury Falling

Apr
16
1996
Bourges, FR
Stadiumwith Natalie Merchant
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Sting s'echauffe a Bercy avant d'ouvrir le Printemps de Bourges; L'ancien leader du groupe anglais Police en demi-teinte...

Le Printemps de Bourges, qui fete ses vingt ans d'age (Le Monde date 14-15 avril), ouvre, le mardi 16 avril, avec un concert de Sting. L'ancien bassiste et leader de Police, defenseur de la foret amazonienne et figure mediatique des annees 80, etait au Palais omnisport de Paris-Bercy les dimanche 14 et lundi 15. Ses melodies peaufinees n'ont pas fait vibrer une salle pleine seulement aux deux tiers.

Comme pour le reste de la tournee francaise de Sting, Natalie Merchant a joue, lundi 15 avril a Bercy, les vedettes americaines. L'ancienne chanteuse des 10 000 Maniacs, groupe modele du folk-rock de la cote est des Etats-Unis, est un petit bout de femme, anodine au premier abord. Mais quand elle denoue ses cheveux, se met a tournoyer et chanter d'une voix qui cumule etrangement austerite et exuberance sensuelle, sa seduction opere. Les morceaux de Tigerlily, son premier album solo, souffrent d'une certaine monotonie, mais ce chant qui conduit au bord du precipice enjole et bouleverse comme peu d'autres actuellement. Bien sur, on aimerait en profiter dans un cadre plus intime, mais le Palais omnisports est celui qui convient, parait-il, aux vedettes du rang de Sting.

Surprise pourtant pour ce second concert parisien (le premier avait eu lieu le dimanche 14), le POPB n'est qu'au deux-tiers plein. L'ancien leader de Police s'est impose en solo il y a dix ans, a tate du cinema avec plus ou moins de bonheur (Dune, Quadrophenia, Radio On) et s'est taille une image de rocker militant au service des bonnes causes (Amnesty, Band Aid, l'ecologie) jusqu'a devenir une des figures mediatiques des annees 80.

Le blond dandy de Newcastle s'est fait aujourd'hui plus discret. Il a eu la satisfaction de voir son association, la Rainforest Foundation, sauver un morceau de foret amazonienne grand comme la Suisse, mais a renonce a faire appel au public et aux medias. Souvenir, peut-etre, de quelques recentes et ameres experiences? En 1995, il avait tourne un spot publicitaire au Japon pour un complexe hotelier dont la construction avait entraine l'abattage de 100 000 pins. Accuse d'hypocrisie, il avait plaide la bonne foi abusee. Quelques semaines plus tard, il prenait une position explosive en faveur de la legalisation de l'ecstasy, dans le souci d'eviter la circulation de produits de mauvaise qualite. Sting prefere desormais s'exprimer en musique, en se penchant plus sur le spleen de l'homme mur que sur le front humanitaire. Album aux teintes pastel et aux modes mineurs, Mercury Falling, son dernier opus, joue de la gravite en variant les styles, en peaufinant les melodies.

Beau gosse elance tout habille de noir, tenant sa basse de facon chevaleresque, Gordon Matthew Sumner, dit Sting, a toujours beaucoup d'allure. Sa voix, au timbre voile et legerement nasal comme un creole parle au nord de l'Angleterre, materialise son indeniable charisme. La pop-star pourtant a paru statique lors de ce decevant concert. Baigne de lumieres pales, entoure de cubes noirs sur lesquels sont projetes d'insignifiants dessins, le groupe un guitariste, un clavier, un batteur, deux cuivres et Sting a la basse s'est souvent contente de reproduire, dans toute leur sagesse, les sons du dernier album.

Depuis son depart de Police, le chanteur stigmatise regulierement le conformisme du rock et son style etrique. Les chansons de Mercury Falling se declinent ainsi en soul, bossa nova, jazz, country ou folk celtique. Habile melodiste, Sting sait tirer parti de chaque style musical. Quitte a preferer parfois le decorum a l'essence. Excellent faiseur , le grand blond sterilise presque autant qu'il vampirise. Exemple, une reprise de The Wind Cries Mary qui transforme la douceur charnelle de ce titre de Jimi Hendrix en une chanson pepere malgre ou a cause de l'intervention de John McLaughlin, virtuose de la guitare jazz-rock, invite pour l'occasion. A force d'arrondir les angles de chansons fortes, Sting parvient a ranger ses tubes mid-tempo dans un rayon que les Americains aiment qualifier de AOR ou adult orientated, synonyme de maturite et, souvent, d'ennui.

Si, indeniablement, le bassiste a signe en solo quelques classiques pop qui font encore frissonner cette fois-ci Englishman In New York et Fragile en conclusion devant une nuee de briquets, ce sont, assez ironiquement, les morceaux de Police qui provoquent le plus d'etincelles. 'Every Little Thing She Does Is Magic', 'Demolition Man', 'Every Breath You Take', 'Roxanne' et ses eternels yiho yihoho repris par la foule, ont prouve leur perenite. Musiciens de jazz et de rock progressif jouant avec opportunisme au trio new wave, Police savait trousser des chansons directes et, en concert, leur alchimie irradiait a l'epoque plus que Sting en cette soiree d'avril.

(c) Le Monde by Davet Stephane
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